Tourteau de soja : les approvisionnements sont sous pression
Le prix du tourteau de soja a bondi sous l’effet du télescopage entre les choix politiques européens et les tensions géopolitiques mondiales, avec un risque de rupture des approvisionnements en 2026.
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L’annonce de la Commission européenne du 3 novembre concernant le RDUE (règlement européen contre la déforestation et la dégradation des forêts) est symptomatique d’un choix politique pris à la veille de la COP 30, déconnecté de la réalité économique de terrain : après avoir annoncé, dans un premier temps (le 23 septembre), le report de la directive interdisant l’importation de soja issu de la déforestation, l’UE, sous la pression des ONG, a décidé dix jours plus tard de maintenir sa mise en application au 1er janvier 2026. « Ce flou réglementaire à moins de deux mois de l’échéance est irresponsable », fustigeait François Cholat, président du SNIA (Syndicat national de l’industrie de la nutrition animale), lors d’une conférence de presse, le 13 novembre.
Conscients de l’enjeu, les fabricants d’aliments français, à travers le développement de la plateforme Duralim initiée en 2021, sont pourtant en mesure de garantir un sourcing à 80 % de tourteau non-déforestant. Mais la méthode est invalidée. Principal point d’achoppement : une exigence de traçabilité à la parcelle, depuis la récolte de la graine. « Or les opérateurs n’importent pas de la graine mais du tourteau, d’où la surcharge administrative induite par cette réglementation. » Un véritable casse-tête et un surcoût déjà estimé à 1,5 Md d’euros pour la filière. Cerise sur le gâteau, les outils de contrôle et de certification de l’UE ne sont toujours pas opérationnels. C’est pourquoi, la Commission propose l’absence de contrôles pendant six mois et un texte de loi simplifié, à débattre entre les trois institutions européennes.
Dans ce contexte, la plupart des importateurs se sont retirés du marché et ne proposent plus de contrats pour 2026. Seuls deux importateurs, Cargill à Montoir (Loire-Atlantique) et Solteam à La Rochelle (Charente-Maritime), assurent apporter les garanties nécessaires. Or l’incertitude et l’absence de concurrence ont un effet délétère sur les cours du tourteau, en hausse de 80 €/t, avec un risque de rupture des approvisionnements. Pour fluidifier le marché et couvrir les besoins de 2026, le SNIA et la Fefac (Fédération européenne des fabricants d’aliments composés) valident le projet de simplification et, en attendant, demandent le report du texte.
Un texte emblématique du Green Deal
Ils pourraient être entendus : à l’heure où nous bouclons, la Commission vient d’annoncer une décision définitive concernant ce report en début de semaine (à partir du 26 novembre). « La prise de position de l’Allemagne et de l’Autriche en faveur d’un report laisse bon espoir d’une application au 1er janvier 2026 favorable à un retour des cours à la normale », explique Karine Noutary, de la société de négoce Avena. Déblocage d’autant plus attendu que ce texte emblématique du Green Deal intervient dans un contexte géopolitique nouveau de négociations commerciales entre les États-Unis et la Chine. L’attente d’un retour aux achats chinois de soja américain tire également les cotations à la hausse et, avec elles, celles des autres tourteaux.
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